Deuxième Dynastie
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Après la dynastie fondée par Bouchard, si étroitement liée à la couronne d'Angleterre et à la couronne de France, on pourrait penser qu'avec Thibaut II, la baronnie de Bray perdrait son éclat, voire sa gloire.

Heureusement, il n'en sera rien. Le sang de Charlemagne, le grand ancêtre, par Thibaut le Tricheur, coule toujours dans les veines du baron de Bray, comte de Champagne.

Mais il n'y a pas que le sang qui compte, et l'esprit du tricheur demeure également. Nombreuses sont les rebellions contre le roi de France, fomentés par le nouveau baron de Bray.

Sans doute dans le but de mettre fin aux révoltes de ses vassaux, Louis VII devenu roi en 1137, tente une politique diplomatique avec eux, par le truchement de mariages.

Lui-même épouse en troisièmes noces, Alix, fille de Thibaut de Champagne, et donne en mariage deux de ses filles à deux frères de son épouse.

La France connaît alors une période de constructions d'églises, de cathédrales et d'abbayes. En 1023 on commençait du Mont-Saint-Michel, en 1063 Notre-Dame de Paris, en 1153 la cathédrale de Sens, en 1220 celle d'Amiens.

Thibaut II meurt en 1152, son fils Henry Ier devient baron de Bray. Il termine la restauration de l'église de Bray dont la consécration est célébrée le 31 août 1169 par Guillaume de Champagne, archevêque de Sens. Puis en 1174, le baron Henry Ier fonde le chapitre et l'église de Bray devient la Collégiale Notre-Dame.

Pour l'Europe, c'est un nouveau temps des croisades.

En 1146, à Vezelay, Saint Bernard prêche la deuxième croisade.

Henri Ier, baron de Bray, part en 1147 avec le roi Louis VII et Conrad de Hohenstaufen.

La troisième croisade a lieu de 1189 à1192; elle est dirigée par le roi Philippe-Auguste assisté du baron de Bray, Henri II, fils de Henri Ier, qui sera désigné roi de Chypre, puis roi de Jérusalem, du consentement des seigneurs croisés.

Le baron de Bray Henri II, était également comte de Champagne et duc de Bourgogne. C'est très probablement lui qui fit construire le palais des ducs de Bourgogne dans la grande rue de Bray. Il est sans doute à l'origine de l'Hôtel-Dieu-Saint-Antoine établi à proximité du palais, comme c'était la coutume à l'époque.

Avec Henri II, couvert de gloire et d'honneurs, la dynastie régnante à Bray redevient vraiment une seigneurie royale. En outre, n'était-il pas le neveu du roi Louis VII, et le cousin germain du roi Philippe II Auguste? Et lui-même roi de Chypre et de Jérusalem.

Mais Henri meurt en 1197, et son fils Thibaut III lui succède sur la baronnie de Bray et le comté de Champagne. Il épouse Blanche de Navarre, sœur du roi Sanche VII.

Au cours de cette époque l'Europe est de nouveau agitée pas les croisades. La troisième, avec Philippe-Auguste (1189-1192).

La quatrième (1202-1204), la cinquième (1217-1221) et la sixième (1228-1229) sans la participation directe de la France.

Cette absence est due en partie aux conflits quasi-permanents avec l'Angleterre, consécutifs au divorce en 1152 de Louis VII d'avec Aliènor d'Aquitaine, laquelle s'était remarié avec Henri Plantagenet duc de Normandie et roi d'Angleterre.

Lorsque les petits Français apprennent l'Histoire de France, on leur dit que la guerre de Cents ans a commencé en 1337 et s'est terminé en 1453, mais en réalité les combats ont duré trois siècles.

Mais n'anticipons pas et voyons d'abord ce qui se passe à la cour de Philippe-Auguste.

Entre les combats, la diplomatie occupe les esprits, tant pour Jean-sans-Terre, roi d'Angleterre, que pour Philippe-Auguste.

Le roi de France estime qu'un mariage serait susceptible de resserrer les liens entre les deux familles. Son fils Louis, né en 1187, bien qu'encore jeune pourrait peut-être faciliter un rapprochement.

Au cours d'un entretien au château de Gaillon, peu après Noël 1199, les rois, Philippe et Jean, envisagent un tel mariage entre Louis et l'une des filles du roi de Castille.

Les ambassadeurs français se rendent sans tarder au château de Palencia où réside la cour castillane en vue de ramener la future épouse du prince Louis. Ils trouvent là, Aliènor d'Aquitaine qui malgré son grand âge, avait fait le voyage pour demander à son fils  de faire aboutir le projet, aidant au choix de la future reine parmi ses petites-filles. Elle avait perçu chez Blanche, la plus jeune, de réelles qualités d'intelligence, de vivacité et de volonté. Après quelques hésitations les ambassadeurs français acceptent Blanche comme fiancé du prince Louis.

Viennent ensuite différents conciliabules et marchandages entre Jean-sans-Terre, Beaudouin IX comte de Flandre, et Philippe II Auguste, suivis de divers accords et traités.

Louis IX ou Saint Louis, Tableau de Gréco

Enfin, après un long voyage à travers la France, la jeune Blanche de Castille arriva le 23 mai 1200 à la petite église de Pontmort en Normandie pour la cérémonie du mariage; cérémonie vite expédiée précise Gérard Sivery et qui note:" mariage de pré-adolescent, Louis n'avait pas encore treize ans, et Blanche était plus jeune de quelques mois".

Dans les premiers temps, ce très jeune couple connut des difficultés à sa mesure. Peu après son arrivée à Paris, si loin de sa famille, la petite Blanche se trouvait fort isolée, elle pleurait souvent, et Louis essayait de la consoler.

Durant quelques années ils vécurent à la cour de France que Philippe-Auguste voulait austère, mais où, de temps à autre; de grandes fêtes apportaient de la gaieté.

Et puis, autour du couple princier, des jeunes de plus en plus nombreux vinrent animer l'entourage royal.

Mais certains enfants élevés à la cour étaient trop jeunes pour être de vrais compagnons pour Louis et Blanche. Par exemple, les enfants d'Agnès de Méranie, légitimés dès 1201; Charlot, un demi-frère de Louis né vers 1206 d'une certaine demoiselle d'Arras maîtresse du roi; puis les fils de Baudouin, comte de Flandres et de Hainaut, dont Philippe-Auguste leur oncle exigea la venue à la cour comme otages en l'absence de leur père, parti en 1202 à la croisade et devenu empereur de Constantinople en 1204, disparu en 1206.

Mais celui qui sera, pour nous sans doute; le plus intéressant et qui arrive à la cour à partir de 1209, c'est Thibaut IV de champagne, fils posthume et héritier de Thibaut III, mort en mai 1201 à l'âge de vingt-deux ans. Epouse adolescente, Blanche se penche avec sollicitude et affection sur cet enfant de huit ans. Thibaut n'oubliera pas.

Lors des fêtes de Noël de 1212, paraît à la cour, le poète Gace Brulé; ses vers charment Thibaut dont il devient le véritable initiateur et conseiller. Thibaut, âme sensible, s'adonne alors souvent à la poésie, ce qui lui vaudra dans l'Histoire le surnom de Thibaut le Chansonnier.

Le temps ayant passé, Thibaut se rendit à l'abbaye de la Pommeraie pour rendre hommage de la baronnie à l'archevêque de Sens.

Mais quelle mouche le piqua en 1221 quand, pour une raison inconnue, il se révolta soudain contre le roi. Pour le châtier, Philippe-Auguste se mit immédiatement à la tête de ses troupes et résolut de fondre sur la Champagne. En situation de nette infériorité et sans allié, Thibaut, effrayé, se jeta aux pieds du roi et lui demanda la paix qu'il obtint en échange de la baronnie de Bray. Il restait cependant comte de Champagne.

A vrai dire, Philippe-Auguste affectionnait déjà depuis longtemps cette baronnie de Bray où il possédait déjà le château de Villeceaux.

Quand à Thibaut, le dernier maillon de la deuxième dynastie des barons de Bray, nous allons le suivre encore quelques temps, car il restera en relations étroites avec la nouvelle dynastie; de par son caractère et de sa personnalité, il a fortement marque son époque.

Philippe II Auguste meurt à Mantes le 14 juillet 1223. Signalons en passant que c'est à lui que la France doit d'avoir été dotée de baillis et de prévôts pour l'administration du territoire.

Le 6 août 1223, Louis VIII et Blanche de Castille sont couronnés à Reims.

On attribue à Thibaut l'établissement en 1226 des fours banaux à proximité du palais, où les habitants devaient venir faire cuire leur pain. La rue du four perpétue le souvenir de cette fondation. Toutefois on peut penser que c'est en qualité de comte de Champagne qu'il prit cette initiative puisque de fait, il n'était plus baron de Bray.

Cette même année, le 8 novembre 1226, Louis VIII meurt; son fils Louis IX est sacré à Reims le 29 novembre, il n'a que douze ans.

La régence est confiée à sa mère, Blanche de Castille. Or celle-ci, on ne sait pourquoi, n'avait pas permis à Thibaut d'assister au sacre. Thibaut, vexé, cherche vengeance, et s'en va rejoindre les vassaux révoltés en vue d'exiger le départ de la régente.

Mais cette défection ne dure pas, et le 2 mars 1227, Thibaut fait sa soumission publique au roi et à la reine Blanche qu'il servit fidèlement jusqu'à 1236.

Les vassaux rebelles s'en prirent alors à Thibaut lui-même et, ayant mis sur pied trois armées, envahirent la Champagne en 1230. Thibaut dut son salut à la reine qui intervient avec l'armée royale et Louis IX, et la révolte fut matée.

En 1234, le roi de Navarre Sanche VII, oncle de Thibaut, meurt. Thibaut est héritier du trône et le comte de Champagne, ex-baron de Bray, devient roi de Navarre sous le nom de Thibaut Ier.

L'entente de Blanche de Castille et de Thibaut, leurs affrontements suivis de réconciliations, leur collaboration politique, évidente sur biens des points, tout cela peut relever de la seule raison d'Etat, mais s'expliquer aussi par les liens de famille et d'amitié. Toutefois, il semble que l'opinion publique de l'époque y a vu tout autre chose.

En 1248 Louis IX part pour la septième croisade. Thibaut prend part à l'expédition, et sa chanson LIV: Appel à la croisade, en est un témoignage.

Cette croisade fut hélas une terrible débâcle à la suite de la défaite de la Mansourah, où le roi fut fait prisonnier.

En novembre 1252, Blanche de Castille meurt et les princes Alphonse et Charles assurent la régence.

En 1253 Thibaut meurt à son tour, et son fils Thibaut II devient roi de navarre.

En 1254, le roi Louis IX rentre de la croisade.

En 1255, Thibaut II épouse Isabelle, fille du roi Louis IX.

Nous avions envisagé de terminer ce chapitre par une chanson de Thibaut, un de ces poèmes courtois que certains pensent écrits à l'intention de Blanche de Castille, mais nous avons estimé que le texte rédigé en francien risquait de ne pas être apprécié par nombre de lecteurs. A cette époque le latin est encore la langue administrative, et le français ne sera généralisé que deux siècles plus tard, et encore il sera ce que nous appelons aujourd'hui le vieux français.

Signalons enfin, que certains historiens ne maîtrisent pas toujours le rang exact de certains personnages. Principalement en ce qui concerne Thibaut, orthographié aussi Thibaud ou Thibault, dans la baronnie de Bray, c'est Thibaut IV (en tenant compte de Thibaut-File-Etoupe), dans le comté de Champagne c'est Thibaut VI, et dans le royaume de Navarre c'est Thibaut Ier, bien qu'il s'agisse du même personnage.

Il convent de noter que le comte de Champagne avait déjà organisé une croisade en compagnie de Frédéric II de Germanie de 1228 à 1241, et qui fut un échec.

En 1270, il participa également à la huitième croisade avec le roi Louis IX. Ce fut une véritable catastrophe.