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Louis-Victor de Rochechouart et Antoinette de Mesmes eurent six enfants, dont Louis, le seul garçon, qui mourut en 1688 quelques jours avant son père. Au décès d'Antoinette en 1709, c'est donc Jean-Batiste, fils unique de Louis qui hérité de la baronnie de Bray. Il était né en 1682. Il fut d'abord connu sous le nom de comte de Rochechouart, puis duc de Mortemart. A l'âge de 17 ans il fut capitaine au régiment de Champagne, ensuite colonel de celui de Béarn en 1702, puis de dauphin infanterie en 1704. Il se trouva au siège de Nice en 1706. Il fut reçu au Parlement comme duc et pair de France le 16 janvier 1747. Le marquisat d'Everly n'a jamais fait partie de la baronnie de Bray, mais depuis le baron de Mesmes, son château était resté la résidence habituelle de la famille quand elle n'était pas à Paris. De ce fait, le palais des Ducs de Bourgogne à Bray se trouva peu à peu abandonné. Toutefois, les actes de vassalité devaient toujours s'effectuer à la Grosse Tour, aussi, étant souvent absent de Bray, le baron avait fini de déléguer ses pouvoirs à un procureur fiscal. Ainsi, c'est devant cet officier, que le 24 juillet 1756, Jean-François-Alexandre de Bernard put reconnaître tenir noblement, en pleine fief, foi et hommage, sa terre et seigneurie de Champigny-sur-Yonne, du baron de Bray, duc de Rochechouart-Mortemart. Signalons qu'en 1717, il avait fait effectuer des réparations au pont de Bray, et un péage avait été institué pour en couvrir les frais. Ce baron rendit l'âme le 16 janvier 1757. De son mariage avec Marie-Madeleine Colber, il eut quatre enfants: Louis (1708-1725), Marie-Anne, décédée en bas âge, Jean-Baptiste-Victor né en 1712, et Charles-Auguste, décédé en bas âge. Seul vivant à la mort de son père, c'est donc Jean-Baptiste-Victor qui hérita de la baronnie de Bray. Il fut d'abord appelé le Chevalier de Rochechouart, ayant été reçu Chevalier de l'Ordre de Malte dès le berceau. Il fut capitaine de cavalerie au régiment de Saint-Simon en 1730; colonel et brigadier des armées du roi en 1743; il obtint le 4 octobre 1750 de Monsieur Languet, archevêque de sens, l'autorisation d'édifier dans son château d'Everly, une chapelle privée, dédiée à Notre-Dame et à Saint-Jean l'Evangéliste. Il mourut à Paris le 30 juillet 1771. Une croix de Malte en pierre d'ardoise perpétue son souvenir au début de l'allée centrale de l'église de Bray. Lorsque Jean-Baptiste-Victor hérita de la baronnie, il constata une situation financière déficitaire et dut prendre des mesures en conséquence. Dès 1758 il loue à bail à Maître Bijole, notaire à Bray, le greffe du bailliage des eaux et forêts du marquisat d'Everly et du bailliage de Saint-Sauveur, avec le droit de scel des sentences et actes, mais avec obligation de tenir de bons registres pour les procès criminels à la requête du-dit seigneur. Le prix de location est fixé à 390 livres par an. En 1764, il loue la chasse au pluvier, moyennant 22 livres. Le 1er janvier 1768, il loue au sieur Claude Morisot, le péage du pont de Bray pour la somme de 250 livres par an. Au mois de novembre 1770 il loue le droit de chasse aux canards pour 90 livres par an. Au cours de cette période il semble que l'on ait effectué quelques grands travaux routiers. Par bonheur, Daniel Trudaine possédait quelques fiefs dans la baronnie, et c'est probablement à lui que nous devons quelques routes plus rectilignes que les anciens chemins dont certains pouvaient dater de l'époque gauloise. Trois grands axes furent ainsi réalisés: la route de Bray à Dontilly, la route Montereau - Bray-sur-Seine - Nogent-sur-Seine, et la route de Bray-sur-Seine à Pont-sur-Yonne. Rappelons que Trudaine avait été nommé directeur des Ponts et Chaussées en 1743. Il avait fondé l'Ecole des Ponts et Chaussées en 1747, et créé le corps des Ingénieurs des Ponts et Chaussées en 1750. Jean-Batiste-Victor de Montemart, décéda en 1771. De son second mariage avec Charlotte de Manneville il eut cinq garçons dont l'aîné lui succéda à la baronnie de Bray: Victurnien-Jean-Baptiste était né le 8 février 1752 à Everly. Il entra très jeune dans l'artillerie et fut, en octobre 1768, admis à l'école d'artillerie de Strasbourg. Il fut nommé colonel du régiment de Lorraine d'infanterie le 20 mars 1774, puis brigadier des armées du roi le 1er janvier 1784, et maréchal de camp le 9 mars 1788. Sur le plan financier, il se vit contraint de poursuivre les pratiques de son père et, dès le 13 mars 1772, il loua les fours banaux à Pierre Billy, boulanger, contre la somme de 600 livres et, le 1er juillet de la même année, la pêche de la rivière Seine, moyennant 150 livres. En 1775, il vend à Maître Colmet-Daage, avocat au Parlement, son procureur de bailliage de Bray et Everly, une charge de notaire royal pour la somme de 1200 livres. Cette même année, il fait construire à ses frais par Noël de Cugnières la route d'Everly à Bray. On pourrait penser que les affermages des barons de Bray auraient pu être réalisés en vue de soulager des soucis de gestion, mais ces apparentes difficultés financières n'étaient-elles pas le reflet de la situation de la France? La politique intérieure de Louis XVI est caractérisée par une instabilité constante, et l'on voit se succéder une suite de ministres que le peuple conteste et renverse: Turgot, Jacques Necker, Calonne, Lamoignon, Brienne... Mais la véritable cause du mécontentement populaire était surtout un manque de nourriture, et la rareté faisait monter les prix, la misère ne cessait de s'accroître. La raison initiale est que depuis quelques années les récoltes n'avaient pas été satisfaisantes et, si en campagne les laboureurs (le mot cultivateur n'était pas encore en usage) subissaient une diminution de leurs recettes, dans les villes la pain se faisait rare et cher. A Bray, le 21 décembre 1788, eut lieu une assemblée des habitants sous le présence du bailli. Les maires et échevins exposèrent que la rigueur et la dureté des temps avaient interrompu le commerce des grains, du fait que la Seine était prise par les glaces depuis plusieurs semaines; de telle sorte que la classe la plus nombreuse de la population, qui est aussi la plus malheureuse et la plus indigente, composée de mariniers, bachotteurs, et voituriers par eau, manquaient de ressources. L'assemblée donna le pouvoir aux officiers municipaux de faire des distributions de pain. Certes, la misère était grande, et cela était le résultat non seulement de mauvaises récoltes, mais aussi d'un hiver particulièrement rigoureux au cours duquel des individus allaient dans les fermes acheter les grains et faisaient monter les cours, spéculant sur la misère du peuple. Il y eut quelques émeutes à Bray, sans gravité, sauf celle du 1er mai 1789 dans la halle aux grains où l'on força les fermiers à livrer leur grain au-dessous de leur valeur réelle. Toutes ces difficultés du moment aidaient à propager dans les esprits des idées porteuses d'espoir que des agitateurs semaient au hasard des rencontres et discussions, promettant dans un proche avenir, une ère de prospérité, de liberté, de justice et de solidarité. Le 8 août 1788, le roi avait fixé le convocation des Etats-Généraux pour le 5 mai 1789. Au jour dit, l'ouverture officielle eut lieu à Versailles, en présence du roi et de mille deux cents députés. le tiers s'opposa aux deux autres ordres. Victurnien-Jean-Basptiste avait succédé à son père comme duc et pair de France. Il fut député de la noblesse des bailliages de Guéret et de Sens, aux Etats-Généraux. Il fit parte de la seconde Assemblée des notables, où éclatèrent en maintes circonstances, son talent d'orateur et son entente des affaires. Comme pair de France, il soutient, au Parlement, la cause des protestants pour leur faire rendre droits civils. Le 5 août 1791, il prit part à la grande discussion qui eut lieu dans l'Assemblée constituante, au sujet de l'hérédité royale. Muni de la teneur du traité d'Utrecht, il en donna lecture et, puisant la droiture de son esprit et la chaleur de ses convictions légitimistes, les arguments les plus judicieux et les plus forts, il contribua à éclairer les Constituants qui votèrent par 541 voix contre 438 la motion suivante:" L'Assemblée reconnaît par acclamation et déclare comme points fondamentaux de la Monarchie Française, que la personne du roi est inviolable et sacrée, que le trône est indivisible. La couronne est héréditaire dans la famille régnante, de mâle en mâle, par ordre de progéniture, sans entendre rien préjuger sur l'effet des renonciations." Quelques mois plus tard il donnait sa démission pour se reposer à la campagne. Victurnien-Bonaventure de Rochechouart de Montmart, frère cadet du précédent, né à Everly le 20 octobre 1753 servit aussi dans l'artillerie. Il fut capitaine au régiment de Navarre en 1771, puis colonel en 1784, et colonel-commandant en 1784, toujours dans le même régiment. En 1788 il présida l'Assemblée de la noblesse du bailliage de Rouen, et fut élu par cette même assemblée, le 23 avril 1789, député de son ordre aux Etats-Généraux. Nous n'avons pas pu déterminer auquel des deux frères on doit attribuer l'abolition des privilèges et des droits féodaux votée par l'Assemblée dans la nuit du 4 août 1789, selon une tradition sur la proposition du député Mortemart. Cependant la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789 n'avaient pas résolu les problèmes, ni rétablit le calme. Dès le 28 octobre 1790 l'Assemblée constituante affirme le Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. C'est en 1791 que l'Assemblée constituante décide de la départementalisation et de la suppression des provinces. Les députés de Navarre protestent et se retirent de l'Assemblée. Dans la baronnie les avis sont partagés. On sait qu'au cours de l'Histoire les mouvements populaires n'y ont apporté que des troubles, des pillages et des victimes. Quant au baron, il a compris, le 18 juin de cette année-là; il cède à la municipalités de Bray, les poids, balances, aulne, étalons et matrices pour la somme de 222 livres. La France, il le pressent, va traverser une période terrible, et tandis que gronde la révolution dans la capitale, il se prépare à se réfugier en Angleterre.
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