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La génération d'après guerre va être la génération du siècle. Les
anciens, ceux d'avant 1914, parleront du passé, tandis que les jeunes, inconsciemment vont se tourner vers l'avenir.
Dans la région de Bray-sur-Seine,la guerre n'a pas laissé de traces matérielles,et les courants politiques divers se manifestent à nouveau. Il y a comme avant une gauche et une
droite,elles-mêmes divisées par des questions de principes ou de détails. Sur le plan religieux les habitudes ancestrales restent d'usage. A partir de 1931 le diocèse comble les vides causés par la guerre. Des prêtres sont réinstallés à Bazoches-les-Bray et à Montigny-le-Guesdier.Des mouvements d'action catholique prennent naissance et rassemblent une bonne partie de la jeunesse de la région,surtout en milieu rural;
(Jeunesse Agricole Catholique) Les adultes sont regroupés par la Ligue d'Action Catholique. Le
Scoutisme prend également son essor dans le canton. Les fêtes patronales sont célébrées dans toutes les paroisses.
C'est alors que l'école laique va commencer discrètement sa propagande politique et athée. Relativement facile en cours d'instruction civique où d'histoire, parfois astucieuse dans d'autres disciplines comme le dessin. A ce propos,il nous revient en mémoire ce journal plié posé sur le coin du bureau du maitre, le titre apparent,et que nous devions dessiner. Quel journal? : L'OEUVRE. Pour des élèves de treize ans cela ne signifiait pas grand chose,mais l'essentiel pour le maître n'était-il pas de nous mettre ce nom dans nos
têtes? Nous sûmes beaucoup plus tard qu'il s'agissait d'un journal "de gauche", mais l'important n'est pas là. C'est encore beaucoup plus tard, sous l'occupation allemande, que le-dit journal récupéré par les nazis, parut à nouveau,et sur les affiches annonçant sa renaissance à la population, on pouvait lire: " Les Français qui n'ont pas voulu mourir pour Dantzig liront l'OEUVRE ".
Mais que s'est-il passé entre le jour où l'OEUVRE fut exposée sur le bureau de l'instituteur et celui où ces affiches furent apposées sur les murs de Paris ?
En France, les partis politiques entretenaient une situation périlleuse marquée de fréquentes manifestations populaires, qui finalement déclanchèrent les grèves de 1936
consécutives aux éléctions qui avaient abouti à l'instauration d'un gouvernement dit de Front
Populaire. La réaction d'extrème droite ne se fit pas attendre et un mouvement secret dit :" La cagoule" , se manifesta par divers attentats.
Malgré des réalisations positives comme la Sécurité Sociale,les Congés payés,la réglementatien du travail et le projet de retraite des vieux travailleurs,la
situation financière ne s'améliorent pas. Même la réalisation de l'éxposition internatinale "Arts et Techniques" de 1937 ne procura aucune accalmie.
Pendant ce temps l'Allemagne prépare sa revanche. En 1938 elle annexe une partie de la Tchécoslovaquie,les Sudètes, puis c'est le tour de l'Autriche. Son attaque de la Pologne en 1939
déclanche la seconde guerre mondiale. La France n'est pas prête, l'Angleterre non plus.
Après un hiver d'immobilité de part et d'autre appelé "drôle de guerre", en 1940,les troupes allemandes envahissent le Luxembeurg,la
Hollande,la Belgique, et déferlent sur la France .... et c'est la débacle.
En juin, la proximité des troupes allemandes incitent les habitants de la région de Bray-sur-Seine à quitter leurs maisons et à prendre les routes du sud. C'est
l'exode.
Le génie français dynamite le pont de Bray et saborde toutes les barques des pêcheurs.
Notre propos n'est pas d'ajouter une étude supplémentaire à tout ce qui a déjà été dit et écrit sur ce sujet,mais de relater quelques évènements relatifs à Bray et à sa région,dans le cadre de
l'esprit de cet ouvrage.
Notre région voit déferler pêle-mêle les troupes en retraite et la foule des réfugiés civils. Nombreux sont ceux qui la nuit dorment à la belle étoile. Certains parfois trouvaient asile sous un hangar ou dans une ferme; c'est ainsi qu'un officier du nom de Michel Riquet fut un soir reçu chez un fermier de Jaulnes Etienne Cormeroy. Le lendemain matin au moment de reprendre sa route vers le
sud,estimant l'inutilité et la charge de sa machine à écrire,il la confia à Monsieur
Cormeroy,lui disant qu'il reviendrait la chercher plus tard.
Dans les jours qui suivirent,vu l'impossibilité de redresser la situation, Albert Lebrun, président de la République,confie la France au maréchal Pétain, et Paul Raynaud envoie Charles de Gaulle à Londres,d'où le 18
juin il lance sur les ondes son célèbre appel.
Le Pays de France est tombé sous la coupe du deuxième Reich,de même que les Pays Bas, la Belgique et le Luxembourg.
Alors commence pour les Français une longue période d'épreuves,de misères, de détresse, et parfois de terreur.
Mais la Résistance prend corps, le "Maquis" se constitue et lutte contre l'envahisseur, préparant les "forces de l'intérieur" en vue de la future libération.
Cependant, l'Angleterre continue la guerre sur mer et dans les airs.La Royal Air Force bombarde tous les objectifs susceptibles de diminuer la puissance allemande,non seulement en Allemagne, mais aussi sur les territoires occupés,sans souci des populations civiles, surtout lorsque les Américains se furent décidés à soutenir les Anglais.
Evidemment,la Bundes Wehr était dotée d'une importante défense anti-aérienne causant de nombreuses pertes aux
escadrilles Anglo-américaines.
Nombreux furent les aviateurs que le sort et la chance déposèrent sur le sol de France,et qui furent recueillis et sauvés par des citoyens courageux. Certains d'ailleurs faisaient partie de divers groupes de Résistance opérant dans la région de Bray-sur-Seine.
Pour rester fidèle au thème de notre récit nous devons citer dans l'un de ces groupes l'abbé Edmond HENRY,curé de Montigny-le-Guesdier, son frère Adrien,dit Francis dans le maquis,séminariste à l'époque, et Albert VERZEL qui lui aussi entrera plus tard dans les Ordres.
Dans le N° 3 des" Cahiers de la Résitance Seine-et-Marnaise" , un auteur cite l'abbé Pierre-Marie LAURENT,curé de Luisetaines,originaire de Bretagne,qui s'était déjà fait remarqué au cours de la première guerre mondiale, ce qui lui avait valu trois citations à l'ordre de son régiment et la médaille militaire. Au lendemaim de la seconde guerre il se vit attribuer la Légion d'Honneur avec la citation: " Ancien combattant de la guerre 1914 -
1918,dès le début de l'occupation allemande,pris part à de nombreux actes de résistance,et facilité l'évasion de nombreux prisonniers, (environ 550). Par sa propagande active a fait passer en Afrique du Nord de nombreux jeunes gens de la région,et sauvé des familles et enfants israélites. S'est porté au-devant des troupes alliées,épargnant ainsi le massacre de population civile,donnant à tous l'exemple d'un grand courage et d'une abnégation au-dessus de tout éloge!.
On cite encore l'abbé Robert BENEZ,à l'époque curé de Bazoches-les-Bray, qui hébergea des résistants allemands et belges évadés de camps de travail dans le nord,et qui par ses soins rejoignirent le maquis "Paul Bert" dans l'Yonne. Son presbytère fut un point important de la Résistance.
Mais à l'inverse de la Résistance une fraction non négligeable de la population française penchait pour la collaboration avec l'occupant.
Pourtant,le rationnement de la nourriture,du chauffage,des vêtements,etc .... aurai pu ouvrir les yeux des plus timorés, mais le "marché noir" parait à certaines difficultés.
Les fusillades d'otages,les arrestations des israélites,l'instauration du Service du Travail Obligatoire en Allemagne, la propagande, tout cela, à la longue devenait exaspérant, et, à contrario, enflait les rangs de la Résistance.
Toutefois,il se trouve que des personnalités exceptionnelles s'étaient décidées à agir seules; c'est le cas de l'abbé Henri-François MENARDAIS, curé de Chalmaison.
Il était né le 9 octobre 1883 à Venelles en Ile-et-Vilaine. Ordonné prêtre en 1909,il fut succèssivement vicaire à Brie-Comte-Robert, curé de Villecerf en 1919, puis de Boissy-le-Chatel en 1924, et finalement à Chalmaison en 1932.
L'intérèt que manifestait l'abbé Menardais pour le monde du spectacle l'avait conduit à hanter le foyer de l'Opéra de Paris. Il s'était pris
en commerçants,quêtant du ravitaillement. Car non seulement il ravitaillait les petits rats de l'Opéra ,mais il devait aussi nourrir de nombreux hôtes clandestins.
Il faudrait un volume spécial Pour conter toutes ses aventures, tant concernant le ravitaillement que ses rapports avec la Gestapo. C'est qu'en effet, s'il est un domaine
où l'activité de l'abbé Ménardais fut immense,c'est bien celui qu'il exerça au secours des Juifs menacés de la déportation et de la mort.Ses initiatives furent infinies,et la réputation qui lui resta, de protecteur des Juifs lui amena de partout une foule qu'il parvenait a cacher dans son presbytère et dans divers refuges. Ne dit-on pas que le petit Serge Gainsbourg
agé de quatorze ans,le futur célèbre chanteur et compositeur,aurait été hébergé à Chalmaison.Il rédigea une quantité fabuleuse d'actes de baptèmes, et de mariages sauvant de la déportation une multitude de Juifs,hommes,femmes et enfants.
Resistant dès Juin 1940, l'abbé Ménardais mit en place un réseau pour faire évader des prisonniers de guerre français qui devaient être démobilisés en zone libre.
Par la suite, réfractaires et résistants pourchassés trouvèrent près de lui assistance et protection.
En 1944, au moment de la Libération, il fit,dans les bois voisins de Chalmaison 52 prisonniers Allemands qu'il remit aux troupes alliées.
Jamais il ne porta d'arme,c'était,disait-il,incompatible avec son état de prêtre.
Dans le parc du chateau de Tachy,au mois de Juin 1947,une foule de plusieurs milliers de personnes rendait hommage à l'abbé Ménardais.
Au cours de la cérémonie,l'attaché militaire de l'ambassade des Etats-Unis décora le prêtre courageux de la "Medal of freedom", le représentant de la Grande Bretagne lui remit le Diplôme de l'Armée britannique Pour services exceptionnels rendus.
Ce même jour, une nouvelle Croix de Guerre fut épinglée sur sa poitrine (la première lui avait déjà été
accordée pour son action courageuse au cours de la guerre 1914 - 1918) La citation signé du général JUIN disait :" Prêtre d'un courage et d'un patriotisme à toute épreuve,s'est dépensé sans compter de Juin 1940 à la libération Pour héberger, protéger et défendre les patriotes traqués et les parachutistes alliés tombés dans nos lignes. A la libération a contribué à faire 52 prisonniers énnemis."
L'abbé Ménardais s'est éteint le 25 octobre 1965 dans la maison de retraite des prêtres de Coupvray.
Enfin, le 27 Juin 1998, en l'église de Chalmaison eut lieu une cérémonie en hommage à l'abbé Ménardais,décoré à titre-posthume de la Médaille des Juste parmi les Nations, décernée par le Mémorial Yad Vashem à ceux qui ont sauvé des Juifs
sous l'occupation au péril de leur vie. Sous le patronage de Monseigneur l'Evêque de Meaux et du Comité Français Pour Yad Vashem.
Après avoir évoqué cette période de guerre des années 1939 - 1945 et mis en relief le rôle et les actions des
éclésiastiques,nous ne pouvons pas oublier les très nombreux chrétiens de
l'ancienne baronnie de Bray-sur-Seine qui ont également combattu dans les rangs de la Résistance et dont certains,trop nombreux hélas, ont offert leur vie à la France.
Dans les premières pages de ce chapitre,nous avons relaté au cours de la "débacle", le passage du Père RIQUET à Jaulnes; l'épisode de la guerre étant passé, il est temps d'évoquer ce passionné serviteur de Dieu.

Né le 8 septembre 1898 à Paris, Michel Riquet, après ses études dans la capitale entre au séminaire de Versailles. Mobilisé durant la première guerre mondiale,jeune soldat de la classe 1918,il s'est fait remarquer par son courage pour porter les ordres sous un violent tir de barrage. La paix revenu,après les scolasticats de Jersey, Hastings et Fourvière, Michel Riquet est ordonné
prêtre de la compagnie de Jésus en 1928.
Docteur en théologie,il devient directeur de la conférence Laénnec.
Mobilisé à nouveau en 1939,il n'accèpte pas la défaite de 1940. Sous l'occupation allemande,ayant pris la tête d'un réseau d'évasion,des aviateurs anglais et américains trouvent refuge auprès de lui, jusqu'à son arrestation le 17 janvier 1944. Les risques accumulés le conduisent dans les camps de Manthausen et de Dachau où il recontre Edmond Michelet.
Tous admirent chez ce petit écciésiastique hâve et nerveux,l'homme et le prêtre que la foi soude ensemble. Rien ne semble affaiblir son âme.
Dès la libération, et les forces revenues,c'est à Lourdes,avec le Père Jean Rodhain, un mémorable pélerinage des prisonniers et déportés.Ceux-ci lui témoignent leur reconnaissance en lui confiant la Présidence d'Honneur de l'Union Nationale des Déportés,la Vice-présidence de l'Office National des Anciens Combattants,la Présidence d'Honneur du Réseau Souvenir.
Grand Officier de la Légion d'Honneur,Croix de Guerre 1914-1918 et 1939-1945, médaillé de la Résistance,Officier des Arts et Lettres,il travailla à la réconciliation franco-allemande.
Durant dix ans,de 1946 à 1955 le Père Riquet prêche le carème à NotreDame de Paris,écouté à la radio par des millions d'auditeurs.
Fervant partisan d'Israel,le Père Riquet se montre parfois désenchanté par la politique de ce pays où il a reçu le titre de Docteur honorie Causa de l'Université hébraïque de Jérusalem.
Fondateur de la Fraternité d'Abraham où Juifs,Musulmans et Chrétiens se rencontrent, artisan de la première heure du Secours Catholique, Viceprésident de la LICRA, le Père Riquet n'a céssé d'être un éclaireur de la paix.
La question que nous nous posons est de savoir à quel moment le Père Riquet a récupéré sa machine à écrire. Etait-ce durant l'occupation
allemande avant son arrestation ou après sa libération ? Il ne reste plus guère de témoins de cette époque,mais on sait qu'il était resté en amicale relation avec Monsieur Etienne Cormeroy;lequel l'invita
à l'occasion du pélerinage de Saint Lyé du 18 juin 1947, attirant en ce jour en l'église de Jaulnes une nombreuse assistance venue voir et écouter le célèbre prédicateur.
Après une longue vie au service de Dieu et des hommes,le Père Riquet s'était retiré
chez les Petites Soeurs des Pauvres avenue de Breteuil à Paris. C'est là qu'il décéda le 5 mars 1993,dans sa quatre-vingt-quinzième année.
Le souvenir du Père Riquet et sa place dans ce siècle nous incite à évoquer un autre personnage,connu à Bray-sur-Seine sous l'appellation de " Docteur Vangeon ", où il est né le 15 mars 1878. son père était pharmacien au 37 grande rue. Elevé selon les préceptes religieux de l'époque,il fréquenta l'école communale de la ville, puis termina ses études secondaires au lycée de Sens, où il perd sa foi vers sa quinzième année.
Enfin,à Paris,il conquit ses grades à la faculté de Médecine, et revint dans son pays natal établir son cabinet médical, 9 rue du Calvaire,aujourd'hui rue Joseph Bara.
Son séjour à Paris lui permit de connaitre et de fréquenter cette génération qui commença à faire parler d'elle un peu avant la guerre de 1914, et de laquelle est sorti semble-t'il,ce qu'il y a de plus durable dans la littérature de notre vingtième siècle. C'était la génération de Paul Claudel (1868), Francis Jammes (1868),Charles Mauras (1868),André Gide (1869), Marcel Proust (1871), Paul Valéry (1871), Charles Péguy (1873) Jacques Copeau (1875).
Madame Vangeon,la mère d'Henri était d'origine normande et d'une famille où l'on s'était ruiné par la passion du théatre, aussi avait-elle transmis à son fils une certaine sensibilité artistique et une inclination à la littératue. Il s'adonnait aussi à la peinture et à la musique.
Dès 1896,à 21 ans,il collaborait à "l'ERMITAGE " d'Edouard Ducoté.
En 1897,ami de la terre et de tout ce que la terre propose à nos sens d'aimable et de désirable, Henri Vageon avait pris
un pseudonyme, ne conservant de son nom que la dernière syllabe : le nom de GHEON L'helleniste y retrouvait le souvenir de celle sur qui ses deux pieds étaient fermement assurés, que sa contemplation suffisait à le satisfaire.
Malheusement, la lettre qu'il y ajouta, ce H qui devait durcir l'initiale,fut au contraire bien souvent l'occasion d'une
prononciation défectueuse. Combien de fois ne l'a-t'il pas rectifiée quand on s'obstinait à le nommer Géon!
En 1897 Henri Ghéon pubiait au "Mercure de France", "Chanson d'aube", et l'année suivante "Solitude d'été".
En même temps que la poésie,le roman tente aussi Henri Ghéon, ainsi que le drame.
En 1899 - 1900 il écrit" Le Consolateur"; il compose " Le Pain " tragédie populaire et lyrique. Le Pain sera joué qu'en 1912.
A la même époque,avec " La vieille dame des rues ", il aborde le roman feuilleton.
Au 9 de la rue du Calvaire,il reçoit volontiers ses amis,Jacqus Copeau, et surtout André Gide qui lui révèle Mozart.
Jacques Reynaud s'interroge : Lequel de Gide ou de Ghéon exerça sur l'autre une influence décisive? De son amitié avec Gide date pour Ghéon nouvelle phase de sa vie
littéraire. Disponible ,affamé de toutes les nourritures terrestres il se replie sur soi, perd de sa première spontanéité, médite sur son art et se désèche par l'analyse. Un seul recueil de poèmes rapporté d'un séjour en Afrique du Nord :"Algérie" en 1906.
En 1909 Henri Ghéon quitte Bray et s'installe à Orsay où il se lie avec Charles
Péguy qui habite à Lozère non loin de là.
Si nous évoquons Henri Ghéon dans cette étude,ce n'est pas spécialement en raison de ses dons artistiques,mais à cause de son appartenance par sa naissance à cette terre d'Eglise qu'est le territoire braytois, et qui vaudra à ce renégat la grâce de sa reconversion.
Certes,la visitation de l'Esprit revêt toutes les formes; pour Ghéon, il aura des égards de grand artiste. Il orchestre pour lui comme un vaste poème. Il s'agit de capter une âme difficile. Il faut frapper à coup sûr.
Rien ne manque à la préparation de l'acte,ni l'accompagnement sauvage de la guerre,ni l'omniprésence de la douleur et de la mort,ni l'angoisse du drame où la France joue son
existense;ni l'intersigne d'un songe prémonitoire,ni le sacrifice d'un héros qui traverse la vie de notre ami en lui transmettant un mystérieux message.
André Gide témoigne : " Henri Ghéon qui durant de longues années avait été son compagnon constant,réformé,s'était engagé dès le début de la guerre; mais ce ne fut qu'après nombre de semaines qu'il put
obtenir de rallier le front où le voici en février 1915 près de la grande Dame,où précisément je savais que devait être le capitaine Dupouey. Tout le temps qu'il était à Paris,aide-major à l'hopital du Louvre,nous habitions ensemble chez des amis communs.
Peu de jours avant son départ je fis un rêve étrange,qui, bien que je me défende de croire aux rêves,me laissa profondément bouleversé. Je me promenais avec Ghéon ,comme nous avions fait si souvent ensemble en Algérie, en Italie,et tout récemment encore en Asie mineure et en Grèce où nous avions senti la guerre se préparer.... Cette fois je ne sais trop où nous étions . Le soir tombait dans une vallée mystérieuse pleine d'ombrages et de chants d'oiseaux.Nous ne marchions pas précisément,mais glissions sur un merveilleux tapis de vapeurs. La vallée devenait plus étroite;le soir plus doux et les chants d'oiseaux si suaves que je me sentais le coeur défaillir.
Et tout à coup,comme cette suavité se faisait presque intolérable,voici que mon compagnon s'arrèta,me toucha le bras, dit :"Pas plus avant." et sa voix était solennelle. " Pas plus avant,car désormais entre nous il y
a ceci". Il ne fit aucun geste,mais mon regard abaissé découvrit aussitôt un énorme rosaire qui pendait à son poignet droit. Je m'éveillai tout en larmes,le Coeur serré par une angoisse dont le réveil ne put me délivrer. "
Quant au capitaine Dupouey que Gide connait depuis 1903,c'est un officier de marine d'une rare valeur intellectuelle.Il a subi lui aussi l'influence des "Nourritures terrestres". Quoique issu d'une famille très catholique le dogme lui semblait peser d'un poids insupportable sur la pensée,la morale,empêcher toute la belle aisance du geste.
En 1911,converti,il épouse Mireille de la Ménardière dont ce serait peu dire qu'elle fut d'une spiritualité hors du commun. En novembre 1914,il est sur le front de l'Yser à la tête d'une compagnie de fusiliers marins. C'est là qu'en janvier 1915,à Nieuport,Ghéon le rencontrera deux fois. Dupouey est tué le samedi
saint 3 avril. Ghéon ne l'apprend que quinze jours plus tard,dalits la douleur et l'éxaltation. Un homme nouveau nait en lui. Il a quarante ans. Le drame de sa vie commence,drame qui fut celui de Paul et d'Augustin, de François Bernadone et de Pascal de Bloy, de Claudel.
Plusieurs livres ou recueils marquent les étapes de sa conversion: Foi en la France (1916), Foi en Dieu (1916-1918),Le miroir de Jésus(1918) puis l'Homme né de la guerre (1919)
Sorti à son tour du marécage ésthétique,et jeté totalement par sa conversion dans le monde conservateur et catholique,Ghéon voit,non sans tristesse,s'éloigner de lui ses amis de la Nouvelle Revue Française. Sans qu'il y eut jamais de vraie rupture ,les liens se relachèrent,mais ont le fête à la Revue Universelle que vient de fonder Henri Massis,à la Revue des Jeunes des R.P. Dominicains. Son but: doter le
peuple chrétien d'un théatre qui fut digne de la civilisation chrétienne et de notre triadition dramatique. Il y dépensera toute sa richesse de dons et tout son
enthousiasme.
Ce qui frappe d'abord,c'est son extraordinaire fécondité. Quatre-vingt-dix titres pour le seul théâtre, plus des romans, des volumes de critique, des volumes d'hagiographie,soit au total quelque cent dix ouvrages,auxquels pourraient s'ajouter aux moins cinq volumes non édités.
Il avait fondé en 1925 un groupe de comédiens amateurs : Les Compagnons de Notre-Dame. Après des années d'efforts il rassemble des foules immenses à Chartres, en Belgique, en Suisse, à Reims, â Montréal.
L'un des premiers,Ghéon avait aussi donné son nom à l'Association des Amis de Saint François, sans rien changer à sa vie
extérieure; peu à peu sa vie intérieure s'éleva dans le souvenir de ses amis disparus. Communiant chaque matin avec une ferveur dont tous ceux qui le voient demeurent frappés,il passe le reste du jour intérieurement occupé de l'Hôte divin que son oeuvre fait rayonner dans les âmes. Il était devenu fidèle tertiaire de l'Ordre de Saint Dominique.
Il souffrait,nous dit Jacques Reynaud d'un mal qui ne pardonne pas et avait été hospitalisé en 1944 dans une clinique parisienne.C'est là qu'il mourut,le 13 juin de cette même
année peu après midi, huit jours après le débarquement allié qu'il attendait depuis quatre ans. Ce fut sa dernière joie.
Henri Ghéon dort son dernier sommeil revêtu de l'habit dominicain. Il fut déposé,provisoirement dit-on, dans un coin du cimetière Montparnasse, en compagnie de ses Pères Dominicains.
L'annonce du débarquement en Normandie,et les premiers succès des troupes des alliés avaient stimulé les populations des pays occupés et des troupes de la Résistance.
Les armées du Reich avaient à combattre,non seu1ement contre des forces supérieures
visibles, mais aussi contre l'adversaire invisible de l'armée de l'ombre. La retraite devint vite inévitable et en quelques semaines, les alliés avaient réalisé une avance notable. A la mi-aout ils étaient aux portes de Paris que les troupes du général Patton contournaient par le sud,poursuivant la Wehrmacht en déroute, dont bientôt,des éléments plus
ou moins isolés traversent la Bassée surtout à partir du 22 ou 23 AOUT. Il y eut des combats de rues à Bray avec des éléments de la Résistance qui se soldèrent par plusieurs morts, des incendies,et prises
d'otages libérés le lendemain. L'arrière-garde allemande dynamita le pont avec telle charge d'éxplosifs que les maisons voisines furent gravement endommagées ou détruites, et que les ondes de choc causèrent de très importants dégats à l'église. Une partie de la nuit l'artillerie allemande arrosa la ville d'obus dégradant maintes toitures. Au matin. les soldats alliés entraient dans Bray enfin libéré. Cependant,la guerre ne sera vraiment terminée que le 8 mai 1945.
Le 3 juin 1944 le général de Gaulle était devenu président du gouvernement provisoire de la
République Française. Après la tourmente,en 1946,les Français élaborerent une nouvelle constitution ratifiée le 13 octobre,et en janvier 1947 Vincent Auriol fut élu Président de la Quatrième
République Française.
Mais si,en Europe,la paix est en principe rétablie,sous l'influence de l'U.R.S.S de nombreux secteurs du monde restent en
effervercence. En ce qui concerne la France, les combats continuent à Madagascar,au Cambodge, au Laos, et au Vietnam. En 1954 René Coty succède à Vincent Auriol à la présidence de la
République. La France vit péniblement cette période d'après guerre qui n'est pourtant nullement la paix. Le Maroc,la Tunisie, les départements d'Algérie sont sujets à des troubles de plus en plus inquiétants. Personne ou bien peu, ne comprendre ce qui se passe. Au lieu de relever leurs ruines et de recréer la paix et la prospérité,les peuples subissent des pressions idéologiques qui s'opposent,et qui trouvent leurs raisons dans les deux guerres mondiales.
D'une part, l'aspiration à la liberté et à l'indépendance des populations islamiques,d'autre part le projet d'hégémonie mondiale de l'U.R.S.S dont la propagande et le matériel se répendent partout, et enfin, la puissance des U.S.A ouvrant et intrigant en vue de leur suprématie financière sur le monde. C'est la vieille devise de Machiavel : "divide ut regnes ", diviser afin de régner. Et la France ,en effet, est elle-même divisée, ce qui va l'amener à la constitution d'une cinquième République et au retour du général de Gaulle.
Nous prions le lecteur de vouloir bien nous pardonner ce rappel des évènements marquants de ce vingtième siècle,ils sert encore dans la mémoire de beaucoup, mais il semble que la dernière génération n'en ait pas eu une nette connaissance. Si nous en faisons mention,c'est uniquement, pour re-situer nos personnages dans leur cadre historique.
En 1961, le 4 Novembre, un prélat basséen s'éteint discrètement : Auguste Belin.
Auguste Belin est né le 28 mai 1881 à Saint-Sauveur-lès Bray, sur cette terre d'Eglise où Bouchard 1er avait rapporté les corps de saint Pavace et de saint Paterne, et près desquels il reçut le baptème.
Traçons rapidement son curriculum vitae: ordonné ,prêtre le 28 juillet 1904 à Meaux,il est immédiatement nommé vicaire de la paroisse Saint Louis à Fontainebleau. Le 1er octobre 1919 il devient professeur au Grand Séminaire dont il devient le Supérieur le 15 juillet 1929, et Chanoine honoraire de la cathédrale. Le 17 septembre 1938,il est élevé au rang de Vicaire général, puis en juin 1946 il est honoré du titre de Prélat de Sa Sainteté.
Alors qu'il approchait de ses quatre-ving ans,il donna sa démission le 7 mai 1960,et se retira à la maison de Retraite des prêtres à Coupvray.
Il était toujours resté très attaché à sa Bassée natale,et séjournait volontiers à Neuvry, chez sa soeur Madame Delacroix. Beaucoup d'anciens et peut-être quelques plus jeunes se souviendront probablement de lui.
Mais pour vous parler de lui, nous avons préferé confier au chanoine Garcet,Doyen du Chapitre,connu des Braytois pour quelques sermonts dominicaux, le soin d'évoquer ce serviteur de Dieu, en reproduiSant l'oraison funèbre qu'il prononça pour ses obsèques.
"Simplement,comme il a vécu; Monseigneur Belin est retourné à Dieu. Permettez-moi aujourd'hui, mes Frères, de rendre un fraternel hommage,- celui d'une amitié presque septuagénaire - au prêtre qui a toujours été pour ses codisciples,un modèle discret, pour ses paroissiens, un guide sûr; pour ses élèves,un conseiller fidèle et pour ses amis,le plus délicat des amis.
En 1896,la paroisse de Saint-Sauveur-lès Bray avait pour pasteur un prêtre de grande valeur, ancien zouave pontifical : l'abbé Mangou, qui devint plus tard supérieur de la communauté de Larchant.
L'abbé Magou,avait discerné les qualités exceptionnelles d'un de ses jeunes enfants de choeur,le prépara à entrer au petit séminaire, en classe de rethorique. Là,le jeune Auguste Belin fit honneur à son curé, prit rapidement la tête de sa classe, enlevant la plupart des prix,et ses condisciples -aucun d'eux ne me contredira - reconnaissant en lui une supériorité simple,souriante et incontestable, n'en conçurent jamais la moindre jalousie.
Au Grand Seminaire, où il entra en 1897,son exemple fut un attrait pour les bons et un reproche muet et fraternel pour les moins bons. En 1904 il reçut la prêtrise des mains de Monseigneur de Briey,et aussitôt, marque de confiance, fut envoyé
comme vicaire dans la paroisse de Fontainebleau.
Jamais confiance ne fut mieux placée,car le nouveau vicaire,appuyé sur de fortes études de théologie et sur une piété personnelle très profonde,se donna tout entier au ministère des âmes, soucieux en particulier de ce problème qui se pose à tous les apôtres ; concilier les éxigences du dogme et de la morale avec la pratique du Père de l'enfant prodigue, allier dans une âme sacerdotale, la haine
effective pour le péché et une miséricorde infinie pour le pécheur.
C'est après dix ans de ce ministère que la guerre le surprit sans le surprendre. L'aumonier du collège devint sur place aumonier militaire.
La guerre terminée,il fut nommé professeur de philosophie au Grand Séminaire,puis,dix ans après, Supérieur.
Il appartiendrait à ses élèves de dire les qualités de son enseignement.
On se doute qu'il n'eut rien de révolutionnaire, mais on sait bien qu'il fut très sûr. Sa foi simple et ferme comme les chênes de nos forêts, ne fut jamais ébranlée par aucun courant d'idées équivoque ou douteux.
On louait avec raison la pertinence de ses conseils et la délicatesse de sa charité. Ses qualités
d'esprit et de coeur,Monseigneur Belin, ne pouvant les supprimer,apportait autant de soin à les cacher que d'autres en mettent à les faire paraître,et set
effacement même était sans prétention.
Sa santé qui avait toujours été suffisante,mais jamais robuste,amena Monseigneur Evrard à le décharger de ses fonctions de Supérieur du Grand Séminaire pour lui en confier une autre aussi délicate,celle de vicaire général,chargé plus spécialement des prêtres et des communautée religieuses. Il accepta ces fonctions comme il avait accepté les autres avec simplicité et humilité. Le "promitto" de son ordination n'avait pas été une vaine formule, et la mantelletta du prélat ne surprit personne, excepté lui.
La discretion du nouveau vicaire général était déjà légendaire. Les défauts ou les imperfections du prochain qui servent si souvent d'aliment à la médisance n'échappaient pas sans doute à sa vue, mais ils échappaient toujours à sa critique.
Les prêtres ou les religieuses qui vinrent alors lui demander conseil pourraient témoigner, j'en suis sûr, de cette discrétion et de cette charité,comme aussi cette "primauté du surnaturel" qui transparaissait en lui.
Mais les années passent,la santé devient chancelante et la maladie conduit Monseigneur Belin à l'Hopital. Il accèpte
l'épreuve avec sa simplicité coutumière. Son indifférence apparente recouvrait une sensibilité très vive en même temps qu'un attachement décisif à la volonté de Dieu qui seule comptait pour lui.
La maison de Coupvray, à laquelle il s'était intéressé comme vicaire général avec tant de charité fraternelle devait être son dernier séjour.
Les religieuses de cette maison l'y entourèrent d'un dévouement délicat et filial autant qu'éclairé. La reconnaissance de ses élèves et l'amitié de ses confrères se traduisaient par de fréquentes visites auxquelles il était très sensible.
Sa fin fut aussi simple et aussi édifiante que sa vie. Ce grand silencieux mourut, sans bruit, comme il avait vécu.
Dans notre siècle d'agitation et de tapage,il demeure un exemple de paix et d'abandon confiant en la Providence. Il achèvera au ciel la tâche commencée ici-bas, et sera pour notre diocèse et ses vocations un protecteur puissant.
Permettez-moi,en terminant,mes frères,de vous lire le dernier adieu de Monseigneur Belin à sa famille. Il nous l'adresse à nous aussi.
"Quittant Saint-Sauveur,le bon Monsieur Magou disait à ses paroissiens : En Vous quittant je vous bénis. Vivons tous de façon à nous retrouver un jour au Ciel" C'est ma consolation de vous redire aujourd'hui les mêmes paroles. Restez bien unis comme nous l'avons toujours été et aidez-vous mutuellement à bien faire la volonté de Dieu. C'est l'essentiel. Ayons confiance en notre Père des Cieux et montrons lui notre amour par notre vie. Je ne vous oublierai pas et je vous dis : " A bientôt ".
Que ces dernières paroles de Monseugneur Belin soient pour tous ceux qui lui survivent une lumière et une force. Gloire au Père, au Fils et à l'Esprit Saint. Amen "
Les conséquences des conflits armés ont des répercutions qui se prolongent très longtemps sur les sites concernés comme dans les consciences. Alors que les traces de la première guerre mondiale ne sont pas
effacées, les conséquences de la seconde perdurent dans tous les domaines. Tandis que nou
rédigeons cet ouvrage, nous constatons que des ruines n'ont pas encore été relevées à Bray-sur-Seine,et probablememt aussi ailleurs. Dans les consciences le mal est considérable ainsi qu'en témoignent les désordres permanents,les scandales de tous ordres,et les troubles politiques.
Le phénomène procède de la logique des évènements,et déjà en 1931, pour pallier à une telle situation,le pape Pie XI avait institué des mouvements d'action catholique laïcs : J.O.C! , J.A.C - J.E.C - et autres.
Le pape Jeall XXIII,en présence d'une situation simiaire,sinon pire, décide du Concile Vatican II en 1962. Ce concile se poursuivra jusqu'en 1965,avec,à partir de 1963,le
Pape Paul VI. Alors que Jean XXIII à l'exemple de Pie XI aurait eu tendance à rappeler les "brebis égarée", il semble que Paul VI ait recherché à adapter la religion aux esprits déréglés et indoctes dans le but de les attirer à l'Eglise. Le résultat fut qu'une religion déspiritualisée,
désacralisée, désuniversalisée, n'eut plus d'attrait pour personne ce qui provoqua une prolifération de sectes dont les adeptes deviennent de plus en plus nombreux.
En conséquence,les vocations se font plus rares, les prêtres de moins en moins nombreux,des paroisses quasi abandonnées. Ajoutons à cela les prises de positions parfois équivoques de certains évêques de France, ainsi que le comportement de quelques prêtres qui ont fait disparaitre des églises qu'on leur avait confiées, des oeuvres d'art,statues et meubles divers, à la grande joie des antiquaires. Nos paroisses n'ont pas été épargnées de ce pillage qui
ne fut heureusement pas général.
Autant d'éléments et de circonstances, qui sans obligatoirement oblitérer la foi sont susceptibles de réduire la pratique religieuse.
De plus,l'Etat qui se dit laïc,donc neutre ,entrave sournoisement par personnel ou organismes interposés, la pratique religieuse par l'orgalnisation d'activités diverses aux jours et heures des offices. En cela, bien entendu, la jeunesse est plus spécialement visée. Il nous semblait pourtant que par le passé, un
jour par semaine, c'était le jeudi ,devait être laissé à la liberté de l'enseignement religieux.
La ville de Bray-sur-Seine dut attendre 27 ans pour restauration de son église endommagée par la violence du dynamitage du pont en 1944, et ne reçut que 10% du montant des travaux au titre des dommages de guerre. Quant à Mouy-sur-Seine, l'église n'a pas été restaurée.
Par ailleurs,la modernisation,la mécanisation, bref ce que l'on voudrait appeler le progrès, sont aussi parfois des manifestations diaboliques.
A Noyen-sur-Seine, pour un are de terre, on a détruit la fontaine Saint Blaise,dont l'eau aurait eu,dit-on,des propriétés curatives pour certaines maladies des yeux. A Villiers-sur-Terre on a démoli un calvaire de pierre sensé géner le passage des moissonneuses-batteuses.
Nous apprchons de l' an 2000 ! Certains s'efforceront de rechercher un symbole en ce chiffre.craint? espoir?
Nous nous n'y remarquerons que trois zéros ;l'humanité en compte des millions !
Ce vingtième siècle se termine pratiquement avec le quinzième centenaire du baptème de Clovis. On ergote sur la date
exacte de ce baptème : 496 ou 499 ?
On discute sur le rôle de Clovis : premier roi de France ou administrateur de la Belgique pour le compte de l'Empereur Constantin ?
Avec Clovis,la France est-elle une simple province de l'Empire romain ou déjà la fille ainée de l'Eglise ? Jamais ces pages d'Histoire n'auront été aussi fouillées,commentées,interprétées,qu'en cette fin du second millénaire de l'ère chrétienne.
Chrétienne, avons nous dit? Mais alors,la baronnie de Bray est-elle encore une terre d'Eglise?
oui très probablement ; maintes familles de ce pays, ont encore la fièrté de compter dans leurs membres des prêtres et des religieuses, gages de fidélité à Dieu, exemples de foi,
signes d'espérance.
Malgré les apparences et les vicissitudes du présent,certaines habitudes ou coutumes attestent des reminiscences du passé inscrit dans le subconscient populaire, ainsi qu'en témoignent les pélerinages à Notre-Dame du Chêne à Preuilly,Notre-Dame de Champrond à Vinneuf,Sainte Anne à Baby,Saint Lyé à Jaulne, voire la Saint Fiacre à Mousseaux les bray; comme aussi le manifeste la survivance de quelques Confréries de Saint Eloi à Bray-sur-Seine et à Bazoches-lès-Bray; et comme le prouve le maintien des fêtes patronales dans les communes ainsi que les traditionnelles célébraltions des Saintes Cécile pour les musiciens, et Barbe pour les pompiers, sans oublier les Feux de la Saint Jean particulièrement prisés par la jeunesse.
Ainsi, on le constate, on peut détruire la raison, mais pas l'âme.
Le 21 juillet 1996, l'abbé Christian Charrier qui venait d'être nommé en remplacement du regretté Père Louis Issler, à Bazoches-les-Bray, lors de sa
première messe dans sa nouvelle paroisse, commenta la parabole de l'ivraie, tirée de l'Evangile de Saint Matthieu (XIII-24). Il n'est pas inopportun de rappeler ce texte:
Le royaume des cieux est semblable à un homme qui a semé une bonne semence dans son champ.Mais pendant que les gens dormaient, son ennemi vint, sema de l'ivraie parmi le blé, et s'en alla. Lorsque l'herbe eut poussé et donné du fruit,l'ivraie parut aussi.Les serviteurs du maitre de la maison vinrent lui dire : Seigneur, n'as-tu pas semé une bonne semence dans ton champ? D'où vient donc qu'il y a de l'ivraie? Il leur répondit : C'est un ennemi qui a fait cela. Et les serviteurs lui dirent : Veux-tu que nous allions l'arracher? Non,dit-il, de peur qu'en arrachant l'ivraie vous ne déraciniez en même temps le blé. Laissez croitre ensemble l'un et l'autre jusqu'à la moisson,et, à l'époque de la moisson je dirai aux moissonneurs : Arrachez d'abord l'ivraie,et liez-la en gerbes pour la bruler,mais amassez le blé dans mon grenier.
Suivant la liturgie traditionnelle cet évangile est celui du Vingt-sixième dimanche après la Pentecête, ce n'était donc pas normalement celui du jour,et cependant, (était-ce prémonitoire ou prephètique ?) il êtait parfaitement adaptê au temps vécu.
Oui,ce bon pays où selon l'Ecriture coulent le lait et le miel, où il fait bon vivre, n'est-il pas un don du Ciel ?' Et qui donc est venu semer de l'ivraie sur ce champs en espérance d'une généreuse moisson ?
- Seigneur; n'as-tu l'as semé une bonne semence ?
- C'est un énnemi qui a fait cela.
- Veux-tu que nou allions l'arracher?
- Non,de peur qu'en arrachant l'ivraie vous ne déraciniez en même temps le blé.Laissez-les croitre ensemble,et à l'époque de la moisson,voas arracherez d'abord l'ivraie pour la bruler,et tous amasserez le blé dans mon grenier.
Cette parabole attire notre attention sur la dangerosité de notre environnement et dénonce un énnemi constant en présence duquel il nous faut vivre. Il se manifeste de mille manières différentes , insidieusement tentateur, férocement cruel, ou d'une stupidité sans égale. Nous trouvons ici l'origine de tous les scandales et crimes de notre temps.
Mais le chrétien n'est pas sans recours:
Dieu l'écoute, " sed ne nos inducas in tentatioltnm et libera nos a male " ....l'
exauce , L'ivraie n'étouffe pas le blé.
Quand le temps sera venu,le Seigneur extirpera l'ivraie et fera sa moisson.
Baronnie de Bray , lieu du martyre de Saint Lyé,seigneurie fondée sur le tombeau de Saint Pavace, sépulture de Saint Paterne, témion d'un miracle de Saint Bernard, qui eut Saint Louis pour baron et hébergea Sainte Jeanne d'Arc, qui reçut la Bienheureuse Anne-Marie Javouhey, fief d'Eglise tu fus créée, Terre Saine tu demeures.
ARCHIVES de PROVINS
ARCHIVES de l'INSTITUT CATHOLIQUE de PARIS
Nous remercions particulièrement Mademoiselle Lehman dont l'important travail nous a été transmis; et Madame Michèle Bardon,archiviste du diocèse de Meaux

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